Paul Kagame, « Hitler » moderne à la peau noire ?
Paul Kagame, le président de la République du Rwanda, est une figure controversée de la politique africaine. Certaines personnes le considèrent comme un héros pour avoir mis fin au génocide de 1994, tandis que d’autres le critiquent pour son autoritarisme, sa répression des dissidents politiques et son implication dans des conflits armés à l’est du Congo. Dans “Thémistocle”, un titre 100% rap et rempli de punchline, maître Gims tacle Paul Kagame, en estimant que « Kagame rimerait avec la croix gammée« , symbole du parti nazi allemand. La campagne « RwandaIsKilling », lancée pour dénoncer l’implication du Rwanda au conflit de l’Est du Congo, appuie également cet aspect.
Ces comparaisons sont des accusations graves qui nécessitent une analyse approfondie de son régime et de ses actions. Kagame avait ironisé face au journaliste d’Afrikarabia en souhaitant plutôt être comparé à Léopold II, l’ancien roi Belge. « Je pourrais commencer par dire qu’Hitler n’est pas connu pour avoir posé des problèmes au Congo. Si ces gens avaient un peu de suite dans les idées, on s’attendrait à ce qu’ils me caricaturent en Léopold II. Mais ces gens cherchent des références ailleurs pour raconter l’histoire à leur façon. »
Dans cet article, nous examinerons de plus près les raisons pour lesquelles Kagame est comparé à Hitler pour ces actions au Rwanda et en RDC.
« #RwandaIsKilling », l’hashtag congolais du moment
Il vient de dire ce que j avais déjà dessiné, l’oeuvre (rwanda is killing) d’ailleurs à l’origine des sanctions sur ma page Facebook #mkadima https://t.co/oLAY2BpWeL pic.twitter.com/9Jhyuwg1IJ
— MKADIMART (@mkadimart) November 13, 2022
La centralisation du pouvoir
Une des raisons pour lesquelles Kagame est comparé à Hitler est sa centralisation du pouvoir. Depuis qu’il est arrivé au pouvoir en 1994, Kagame a travaillé à renforcer l’autorité de l’État et à réduire les pouvoirs des gouvernements locaux et de l’opposition. Il a également créé une structure de parti unique et a éliminé toute opposition significative. Cette centralisation du pouvoir est similaire à celle d’Hitler, qui a également supprimé toute opposition pour renforcer son régime.
Kagame a renforcé le pouvoir exécutif en créant des structures de gouvernance parallèles, telles que le Bureau de la présidence et le Conseil national de sécurité. Ces structures ont permis à Kagame de contrôler de près les décisions politiques et d’assurer sa domination sur le gouvernement.
En outre, Kagame a cherché à limiter l’indépendance de la justice et du système judiciaire. Les critiques affirment que les juges sont soumis à des pressions politiques et que les procès ne sont pas toujours équitables.
Les critiques affirment que la concentration du pouvoir entre les mains du président peut entraîner des abus et des violations des droits de l’homme, et qu’elle entrave le développement d’institutions indépendantes et responsables.
La répression de la dissidence
Une autre raison pour laquelle Kagame est comparé à Hitler est sa répression de la dissidence. Les opposants politiques et les journalistes qui critiquent le gouvernement sont souvent arrêtés, emprisonnés ou exilés. Sylvain Sibomana, Alexis Rucubanganya, Hamad Hagengimana, Jean-Claude Ndayishimiye, Théoneste Nsengimana, Régine Kadoyimana… Soit membre d’un parti politique ou journaliste, tous arrêtés.
#Rwanda : Alarmante hausse de la répression contre les membres de l'opposition (notamment les partisans de Victoire Ingabire, vue ici à sa sortie de prison en 2018), et contre les journalistes.👉https://t.co/ePRYpVUyB4 pic.twitter.com/pslisl0kDY
— HRW en français (@hrw_fr) October 19, 2021
Des rapports ont également fait état d’assassinats et de disparitions de dissidents. Cette répression est similaire à la purge que Hitler a menée contre les Juifs, les communistes et les autres groupes qu’il considérait comme une menace pour son régime. « Ces arrestations manifestement arbitraires et politiques sont destinées à dissuader davantage les personnes de s’exprimer contre la politique ou les abus du gouvernement », a expliqué Lewis Mudge, directeur pour l’Afrique centrale à Human Rights Watch.
Le plus récent c’est le cas de Paul Rusesabagina, farouche opposant au président rwandais Paul Kagame et héros du film « Hôtel Rwanda ». Après plus de 900 jours de prison, cet opposant a été libéré suite à un accord conclu entre les gouvernements américain et rwandais avec l’aide des amis Qataries.
Pour Lewis Mudge, “la libération de Rusesabagina mettrait fin à une affaire qui a mis en lumière le mépris flagrant du Rwanda pour les normes internationales lorsqu’il cherche à cibler des personnes considérées comme ennemies de l’État – même celles qui se trouvent bien au-delà de ses frontières”, a-t-il déclaré à Al-Jazeera quelques heures après la libération de l’opposant.
La propagande et le culte de la personnalité
Kagame est également comparé à Hitler en raison de la propagande et du culte de la personnalité qu’il a créés autour de lui-même. Le gouvernement rwandais utilise les médias pour glorifier Kagame et son régime, et les citoyens seraient souvent obligés de participer à des événements publics pour montrer leur soutien au président.
Kagame et le parti au pouvoir, le Front patriotique rwandais (FPR), ont créé une image de Kagame en tant que sauveur du Rwanda après le génocide de 1994, et ont utilisé cette image pour renforcer leur pouvoir et leur légitimité.
La propagande est souvent utilisée pour faire passer des messages politiques ou idéologiques, et Kagame et le FPR ont utilisé différents moyens de communication pour diffuser leur message. Cela inclut la presse, la radio, la télévision et les réseaux sociaux, où des messages positifs sur Kagame et le FPR sont diffusés régulièrement. Le gouvernement a également créé des centres de médias pour surveiller et contrôler l’information, et pour empêcher la dissidence et la critique.
Le culte de la personnalité est un phénomène où un leader politique est glorifié et idolâtré par ses partisans et sa population, au point que sa personne devient plus importante que le bien-être de la société. Kagame est souvent représenté comme un héros national, et ses partisans le vénèrent comme un leader fort et visionnaire qui a su redresser le pays après le génocide. Les statues de Kagame sont érigées dans tout le pays, et les écoles et les hôpitaux portent souvent son nom. Les critiques affirment que cela va à l’encontre des principes démocratiques et de la liberté d’expression, car cela crée une culture où la critique du leader est mal vue.
Ce culte de la personnalité est similaire à celui d’Hitler, qui a utilisé la propagande pour créer un culte de sa personnalité et encourager le soutien du peuple allemand.
Kagame, parrain de la guerre du Congo ?
La guerre du Congo est l’un des conflits les plus sanglants et les plus complexes de l’histoire récente de l’Afrique. Depuis le début des années 1990, des groupes armés se battent pour le contrôle des richesses du pays, notamment les ressources minérales. Le Rwanda, sous la direction de son président Paul Kagame, a été impliqué dans ce conflit depuis le début. Kagame est considéré par beaucoup comme le parrain de la guerre du Congo, mais pourquoi ?

Le rôle de Kagame dans la guerre du Congo
Kagame était le chef des forces rebelles tutsies du Front patriotique rwandais (FPR) qui ont pris le pouvoir au Rwanda en 1994.
Après avoir pris le pouvoir, Kagame a accusé les forces hutues génocidaires d’avoir fui au Congo voisin et d’utiliser le territoire congolais comme base pour lancer des attaques contre le Rwanda.
Or pendant cette période l’instabilité s’installe au Zaïre (Congo). Le conflit congolais a commencé en 1996 lorsque l’Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo-Zaïre (AFDL), soutenue par le Rwanda et l’Ouganda, a renversé le président Mobutu Sese Seko. Laurent-Désiré Kabila a été porté au pouvoir, mais les relations entre Kabila et ses anciens alliés se sont rapidement détériorées. En 1998, Kagame et l’Ougandais Yoweri Museveni ont lancé une nouvelle intervention militaire en République démocratique du Congo (RDC), alléguant que Kabila soutenait les militants hutus rwandais.
En réponse, Kagame a lancé plusieurs invasions de la RDC pour poursuivre les forces hutues, mais ces opérations ont rapidement pris une tournure plus large et se sont transformées en une guerre régionale. Kagame a soutenu les forces rebelles congolaises et a aidé à renverser le président congolais Laurent-Désiré Kabila, qui avait pris le pouvoir en 1997.
Les forces rwandaises et ougandaises ont occupé de vastes zones du pays, pillant les ressources naturelles, notamment les diamants, l’or et le coltan. Depuis lors, le conflit a impliqué de nombreux autres groupes armés, dont certains ont reçu le soutien du Rwanda. Actuellement on parle du M-23.
Les critiques de l’implication de Kagame
Le rôle de Kagame dans la guerre du Congo a été vivement critiqué par de nombreux observateurs. Les critiques ont souligné que Kagame a joué un rôle clé dans l’escalade du conflit en soutenant les groupes armés, dont le l’actuel M-23, groupe armé majoritairement tutsi, qui continue de commettre des atrocités contre les civils congolais. Cela est confirmé par un récent rapport des experts des Nations-Unies.
Dans ce document, des experts mandatés par l’ONU affirment avoir collecté des « preuves substantielles » démontrant « l’intervention directe des forces de défense rwandaises (RDF) sur le territoire de la RDC », au moins entre novembre 2021 et octobre 2022.
Les forces rwandaises ont également été accusées d’avoir pillé les richesses du Congo en toute impunité. Le gouvernement rwandais a nié ces accusations, affirmant que son intervention en RDC visait à protéger sa sécurité nationale. Cependant, les critiques ont noté que les actions du Rwanda ont eu des conséquences dévastatrices pour les civils congolais, contribuant à une crise humanitaire qui a vu des millions de personnes être déplacées ou tuées.
Le futur de la région
Le futur de la région des Grands Lacs en Afrique, comprenant la RDC, le Rwanda et d’autres pays voisins, est incertain. La région a été marquée par des conflits violents, des guerres civiles et des violations des droits de l’homme pendant de nombreuses années. Les accusations contre Kagame ont été une source de tensions entre le Rwanda et la RDC, et ont contribué à la persistance des conflits dans la région.
Le conflit congolais a des racines complexes et profondes, et il n’y a pas de solution facile. Cependant, certains observateurs ont noté que le retrait des forces rwandaises, directement ou indirectement impliquées en RDC, serait un premier pas important vers une résolution pacifique du conflit. Le gouvernement rwandais a récemment nié son implication dans le conflit, mais les critiques restent sceptiques quant à la volonté de Kagame de mettre fin à l’implication de son pays dans les affaires de la RDC et au soutien de la rébellion du M-23.
De l’autre côté, le futur de la région des Grands Lacs dépendra de la capacité des pays de la région à coopérer et à résoudre les conflits, ainsi que de la volonté de la communauté internationale à soutenir les efforts pour la paix et la stabilité.

Pour comprendre le M23, il faut remonter au CNDP, le Congrès National pour la Défense du Peuple. Entre 2006 et 2009, ce groupe armé avait réussi à déloger l’armée congolaise de plusieurs agglomérations de la province du Nord Kivu. Le 23 Mars 2009, sous la facilitation internationale, le gouvernement congolais et le CNDP signent un accord qui prévoit, entre autres, le retour des réfugiés congolais vivant dans les pays voisins et la lutte contre la xénophobie dont sont victimes les »congolais rwandophones. » Mais en avril 2012, des anciens combattants du CNDP intégrés dans l’armée congolaise se mutinent et créent le M23... (Suite)
Que faire ?
En conclusion, bien que Kagame soit considéré comme un héros par certains, les actions de son régime suscitent des critiques et des comparaisons à Hitler en raison de sa centralisation du pouvoir, de sa répression de la dissidence, de la création d’un culte de la personnalité et surtout de son parrainage de l’instabilité à l’Est de la RDC. Cependant, il est important de noter que cette comparaison est controversée et que Kagame et son gouvernement ont également réalisé des progrès significatifs dans le développement économique et social du Rwanda.
Il est également important de noter que la comparaison avec Hitler peut être considérée comme extrême et inappropriée par certains, car les actions de Kagame ne peuvent pas être comparées à l’ampleur et à l’horreur de l’Holocauste. Néanmoins, la centralisation du pouvoir et la répression de la dissidence sont des pratiques autoritaires qui soulèvent des préoccupations quant à la démocratie et aux droits de l’homme au Rwanda. Avec plus de six millions de victimes, le conflit en République démocratique du Congo (RDC) est le plus meurtrier depuis la Seconde guerre mondiale, et des centaines de milliers de déplacés à l’Est du Congo. Il est crucial que la communauté internationale continue de surveiller la situation au Rwanda et son implication dans cette guerre devrait être condamnée.

En fin de compte, la guerre du Congo est complexe et difficile à comprendre. Cependant, il est clair que l’implication de Kagame dans le conflit a eu des conséquences dévastatrices pour les civils congolais. Les critiques ont souligné que le Rwanda doit prendre ses responsabilités pour ses actions passées et travailler avec la communauté internationale pour résoudre le conflit. Espérons que cela se produira bientôt et que la RDC pourra enfin connaître la paix et la stabilité. Bien que ça reste chimérique, car l’homme demeure un loup pour son semblable et que l’action de ce système des choses reste vaine.
Les initiatives de la communauté internationale en RDC
Depuis le début des conflits dans la région des Grands Lacs en Afrique, la communauté internationale a pris des mesures pour soutenir la paix et la stabilité en RDC. Les Nations unies ont établi une mission de maintien de la paix en RDC, la Mission de l'Organisation des Nations unies pour la stabilisation en RDC (MONUSCO), pour aider à protéger les civils et à promouvoir la paix et la sécurité dans le pays.
En plus de la MONUSCO, d'autres organisations internationales ont travaillé à promouvoir la paix et la stabilité en RDC. Par exemple, l'Union africaine (UA) a créé une Commission de haut niveau pour la région des Grands Lacs, qui vise à encourager la coopération et à soutenir les initiatives de paix dans la région. L'UA a également organisé plusieurs sommets régionaux pour discuter de la sécurité et de la stabilité dans la région.
De nombreuses organisations non gouvernementales (ONG) ont également travaillé à soutenir la paix et la stabilité en RDC. Par exemple, l'International Crisis Group, une ONG qui se concentre sur la prévention et la résolution des conflits, a publié plusieurs rapports sur la situation dans la région des Grands Lacs et a proposé des solutions pour promouvoir la paix et la stabilité.
Cependant, malgré ces initiatives de la communauté internationale, la situation en RDC reste complexe et difficile. Les groupes armés continuent de commettre des violations des droits de l'homme, et la paix et la stabilité dans la région restent fragiles. Il est donc important que la communauté internationale continue de soutenir les efforts pour la paix et la stabilité en RDC, en travaillant en étroite collaboration avec les gouvernements de la région et les organisations de la société civile.
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